Article original datant du 27/03/22
Attention, les propos dans cette article peuvent être choquants et de nature à heurter la sensibilité de certains lecteurs
Kevin R. Brock est un ancien directeur adjoint du renseignement pour le FBI et directeur adjoint principal du Centre national de contre-terrorisme (NCTC). Il consulte indépendamment des entreprises privées et des agences de sécurité publique sur les technologies de mission stratégique.
« Pédopornographie » est une de ces expressions aseptisées comme « camp de concentration » ou « opération militaire spéciale » qui est loin de décrire les horreurs de sa véritable nature. C’est un terme qui peut être utilisé sotto voce en compagnie polie lorsque le sujet inconfortable est abordé lors d’un cocktail ou, disons, d’une audience de confirmation d’un candidat à la Cour suprême.
Faire référence à l’abus sexuel cruel de petits enfants dans un langage fade permet un discours superficiel comme celui auquel on a assisté cette semaine lors de l’entretien de la commission judiciaire du Sénat avec la juge Ketanji Brown Jackson, que le président Biden a nommée pour occuper le siège du juge Stephen Breyer qui prend sa retraite. Cela a permis un échange juridique stérile entre les sénateurs et Jackson sans avoir à dire tout haut la violente réalité de ce dont ils parlaient vraiment.
Mettons donc en contexte ce que représente réellement le terme « pédopornographie« , des enquêtes que j’ai supervisées pendant ma nomination au FBI. Disons tout haut ce que les forces de l’ordre rencontrent chaque jour à une échelle toujours plus grande. Et gardons tout cela à l’esprit lorsque nous examinons le raisonnement de Mme Jackson pour justifier les peines plus légères infligées aux abuseurs qui ont atterri dans son tribunal.
Voici la dure réalité : Ces images représentent principalement des enfants prépubères, voire des nourrissons. Elles sont effrayantes, beaucoup sont sanglantes, beaucoup dépeignent des cris et des pleurs, de la douleur et de l’impuissance. Elles montrent des petits enfants drogués et forcés à faire des actes horribles et à subir des abus innommables qui marquent leur vie. Ils représentent des enfants qui ont été enlevés, victimes de la traite, attirés chez un voisin ou un parent ou, chose incroyable, confiés par un parent à un abuseur contre de l’argent.
Cette industrie malade scrute les plateformes de réseaux sociaux, copie les photos que vous publiez de vos petits, puis les manipule numériquement pour en faire des images infâmes. Soyez conscients, parents.
Ce n’est pas de la « pornographie enfantine » ; il s’agit surtout de la torture réelle ou représentée de petits enfants innocents par des hommes (au masculin dans l’article original, NdT) adultes qui enregistrent la torture et la vendent à d’autres hommes, qui perpétuent le crime en échangeant le contenu et en créant une nouvelle demande, ce qui, dans un cercle vicieux, génère d’autres petites victimes. C’est cette réalité qui rend les efforts de Jackson pour expliquer son approche douce envers ces criminels d’autant plus troublants.
Au cours de son audience de confirmation au Sénat, Mme Jackson a été confrontée à son dossier qui, en moyenne, a réduit de près de moitié les peines infligées aux personnes condamnées par son tribunal pour avoir enfreint les lois sur la pédopornographie, lorsqu’elle avait le pouvoir discrétionnaire de le faire. Malheureusement, d’autres juges se sont également écartés des lignes directrices relatives aux peines à certains moments, mais pas dans tous les cas.
Mme Jackson n’est peut-être pas en mesure de définir ce qu’est une femme, mais elle a manifestement beaucoup réfléchi aux raisons pour lesquelles elle estime que les directives en matière de détermination de la peine sont injustes pour ceux qui participent et perpétuent une industrie qui brutalise de jeunes enfants.
Elle a été mise sur la défensive et a répondu, comme beaucoup le font à Washington, en attribuant le blâme ailleurs. Elle s’est rapidement retrouvée en difficulté en rejetant la faute sur le Congrès, puis sur les procureurs, puis sur d’autres juges, puis sur la Commission des peines des États-Unis, sur l’Internet, sur les restrictions à vie de l’accès aux enfants et aux ordinateurs, et enfin sur la société elle-même, qui, selon elle, « fuit » injustement les délinquants sexuels.
Plus d’une fois, elle a affirmé que son pouvoir discrétionnaire devait être guidé par un principe selon lequel la peine doit être « suffisante mais pas plus grande que nécessaire pour promouvoir les objectifs de la punition« . Pourtant, dans les cas de pornographie infantile où elle disposait d’un pouvoir discrétionnaire de détermination de la peine, elle a déterminé que la peine recommandée n’était pas nécessaire et qu’un niveau inférieur suffirait.
Les peines, cependant, sont également conçues pour dissuader les mauvais comportements – non seulement par le délinquant, mais aussi au sein de la population, où les peines devraient être suffisantes pour dissuader les autres de commettre des crimes similaires. Il est difficile d’indiquer un autre crime qui mérite d’être plus dissuasif que le fait de tourmenter un enfant à des fins sexuelles. Mais, Jackson n’a pas reconnu les avantages de peines plus élevées qui pourraient dissuader la participation à l’industrie de l’abus sexuel des enfants.
Elle a cependant offert une justification étonnante et déroutante pour ses peines plus légères en affirmant, tout en discutant d’un rapport de la commission de détermination de la peine de 2013, que la loi n’a pas suivi l’évolution de la façon dont la pornographie enfantine est consommée. La logique deson raisonnement était difficile à suivre mais elle a finalement comparé l’acquisition pré-internet de ce type de contenus illégaux par courrier à la vaste quantité maintenant disponible en ligne. Elle a affirmé que l’abondance et la facilité d’acquisition d’images horribles dans le monde d’aujourd’hui constituent en quelque sorte un facteur disculpant lorsqu’il s’agit de tenir les délinquants responsables. En d’autres termes, puisque vous pouvez en obtenir davantage de nos jours, vous devriez être moins puni. Une bonne nouvelle pour les méchants, mais pas si bonne pour les enfants.
Mme Jackson a déclaré plus d’une fois qu’elle a dû regarder ces images terribles présentées comme preuves dans son tribunal. Ce fait n’aide pas son argumentation ; il ne fait que remettre en question son jugement car, comme le savent tous les membres des forces de l’ordre, ces images répugnantes n’engendrent pas de sentiments de tolérance et de réduction de peine chez une personne normale. Qui regarde une telle horreur et se dit : « Oui, je vais réduire leur peine de moitié » ?
Jackson a souligné à juste titre que ce type de contenus abusif était autrefois plus difficile à obtenir. En fait, il avait été largement éradiqué, grâce à la persévérance des services postaux américains et du FBI. Puis vint l’Internet, et aujourd’hui, c’est un feu de forêt en pleine expansion qui infecte la société de manière dévastatrice.
La consommation croissante d’images d’enfants dans des situations sexuelles se produit en même temps que la « préparation » manifeste d’enfants d’âge scolaire qui a soudainement éclaté au grand jour d’une manière qui était inconcevable il y a seulement quelques années. Des efforts visant à exposer et à désensibiliser prématurément les enfants dès leurs premières années scolaires aux sujets sexuels, le placement de romans pornographiques dans les bibliothèques scolaires, la propagande sur la fluidité des genres et l’autorisation pour les garçons d’accéder aux salles de bains des filles sont imposés à nos jeunes.
Le type de saturation de pornographie enfantine que nous connaissons dans ce pays aura des conséquences. En tant que peuple, nous devons être pleinement conscients que la philosophie de Jackson, qui consiste à faire preuve d’indulgence envers les participants à l’industrie la plus malade de la société, est sur le point d’être importée à la plus haute cour du pays.